Les leçons du Covid-19 pour la filière Bio au Maroc par Slim Kabbaj & Dr. Yasser Medkouri
Chers amis,
Alors que la situation de crise internationale due au coronavirus évolue rapidement, laissant bien peu de certitudes aux analystes de l’avenir et aux futurologues, les gouvernants, les entrepreneurs et les managers questionnent le court terme et le moyen terme, de façon pragmatique. Les pays européens réfléchissent ainsi de plus en plus ouvertement à la fermeture des frontières et plus stratégiquement à promouvoir les productions nationales, à relocaliser les secteurs vitaux, dont les industries de base, à développer le marché national, afin de combler les lacunes et dépendances dramatiques révélées par la pandémie actuelle.
Au Maroc, la crise économique qui a débuté a commencé à toucher des secteurs considérés jusqu’à présent prioritaires, le tourisme, l’industrie lourde, le textile et autres secteurs générateurs de devises notamment, comme les MRE. La loi des finances devra probablement être réorientée vers les secteurs vitaux de court terme, la santé, l’alimentation, et dans une certaine mesure l’enseignement, incontournable. Compte tenu des restrictions européennes à l’importation, le Maroc sera amené à rééquilibrer ses choix, partant de la prééminence tout azimut des produits vers l’export pour aller vers une stratégie plus raisonnée qui prendra en compte le développement du marché national, l’industrie nationale, le commerce de proximité.
Dans ce débat d’idées et cette dynamique de réflexion, nous entrepreneurs du Bio, avons des messages à avancer et des stratégies à défendre : promouvoir l’agriculture biologique, excluant l’utilisation des produits chimiques et les OGM, et mettre en avant les produits Bio, produits primaires et produits à valeur ajoutée. Ce secteur est fortement créateur d’emplois, porteur de prévention et synonyme de consommation saine, donc de renforcement du système immunitaire et de bonne hygiène de vie. Ce secteur est respectueux de l’environnement (sols, eau, air, océans) et de la biodiversité et bien moins émetteur de CO2 et gaz à effet de serre, moins impactant donc sur les changements climatiques, que le secteur de l’agriculture et de l’alimentation conventionnelles.
Chers amis, comme résultante de la crise actuelle, prenons garde que le Bio ne soit enterré pour des années, une fois de plus, et défendons nos convictions pour que la subvention pour la conversion vers l’agriculture biologique soit préservée, pour que nos produits ou ingrédients importés ne soient pas réduits par des mesures de protection (plus ou moins officielles), pour que l’export de nos produits soit facilité, et enfin que tous les efforts multidimensionnels que nous avons engagés ces dernières années continuent à porter leurs fruits. Le Bio doit continuer à être considéré comme un secteur crucial pour notre pays et les produits Bio comme fondamentaux pour les consommateurs, prolongeant les actions de démocratisation, de sensibilisation et de stimulation des productions nationales, autant que faire se peut.
Chers amis, accélérons les rapprochements entre nous pour produire plus, mieux, plus diversifié. Nous croyons que les compétences et le savoir faire dont nous avons fait preuve ces dernières années doivent donner lieu à plus de synergie, à plus de partenariats et de collaborations. Préparons-nous à être plus solidaires, plus offensifs et plus réactifs et bien sûr suivons de près les évolutions et les mutations. C’est dans ces moments difficiles et de doutes, que notre capacité de leadership doit s’exercer pour notre intérêt individuel et collectif, et surtout pour l’intérêt national. Un grand penseur du management disait «manager, c’est prévoir » ; prévoyons et manageons les amis.
Slim Kabbaj, Yasser Medkouri